Jardiniers de L'espace

Les vignobles de Banyuls et Collioure

Fille et sœur de vignerons du Languedoc où la vigne s’étend en plaine, je suis fascinée depuis l’enfance par la géométrie du vignoble de Banyuls, si différent : les milliers de lignes de murets parfaitement organisés sur les montagnes, les vignes en pente, l’acrobatie indispensable à leur culture, les veines de schistes bleu sculptant le sol ocre sur fonds de bleu Méditerranée, l’harmonie des pierres assemblées comme une dentelle d’histoire… C’est un grand plaisir de les contempler uniques et multiples, et bien au-delà, de comprendre leur histoire et ce qui, aujourd’hui, les menace.

Ces murettes centenaires et muettes m’impressionnent : la sagesse, la force symbolique et la mémoire des fragments d’humanité qu’elles évoquent forcent mon admiration.

Le film est un hommage à cette douce folie d’humbles artistes, de "sculpteurs de montagnes" comme les appelait Aristide Maillol, l’enfant du pays, sculpteur connu dans le monde entier.

Mon intention est de montrer que ces murettes centenaires, langage de la pierre et symbole de ce terroir, résistent depuis longtemps aux intempéries et que les remplacer par d’autres systèmes illusoirement moins coûteux n’est qu’une hypothèse à court terme.

Témoins d’un autre âge, elles citent de manière très contemporaine, notre rapport au temps, l’accélération des rythmes de vie, les rendements à trop court terme.

Même si ces murettes de patience n’ont pas d’incidence sur les saveurs des vins, mon intention est de démontrer qu’elles sont un gage de qualité culturale dans les nouvelles ou dans les anciennes vignes.

Les raser sans vergogne au nom de la rentabilité signe la menace d’un irréversible effacement des racines d’un terroir d’exception.