Viticulture et pathologie : Éléments pour une viticulture raisonnable
Auteur(s) auteurs | André Crespy - Ingénieur Agronome |
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Nb pages nb_pages | 192 |
Année d'édition anneedition | Non |
Langue(s) langues | Français |
Autres versions disponibles versions_disponibles | Aucune |
Récompenses recompenses | Non |
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Franco tous pays price_expo | 80,00 € |
PREFACE
Protection phytosanitaire du vignoble et environnement
Comme toutes les cultures spécialisées et relativement intensives, le vignoble doit être protégé des attaques de maladies et ravageurs divers. De plus, l’introduction accidentelle de maladies d’origine américaine (mildiou, oïdium, black-rot) a créé une situation nouvelle : en effet, auparavant, les seules maladies dangereuses étaient le botrytis et l’excoriose. L’obligation de lutter contre ces nouvelles maladies a fait du vignoble une source de pollution importante et constante pendant toute la phase végétative dans les régions de culture traditionnelle sans irrigation. En zones plus sèches, seul l’oïdium peut représenter un danger pour la culture.Par ailleurs, dans les vignobles prestigieux, beaucoup de propriétaires ne tolèrent pas d’attaques parasitaires, considérant que cela peut entraîner des baisses de qualité et de volume ; Quel que soit le coût des traitements phytosanitaires, ils sont réalisés quasi-systématiquement.
Pour ce qui concerne l’entretien des sols et la fertilisation, on constate que le raisonnement est encore loin d’intégrer les conditions environnementales et la pollution par les désherbants ou les engrais chimiques s’est généralisée. Un tel constat ne pouvait qu’entraîner des réactions :
- Réactions de la part d’agriculteurs soucieux d’écologie, ce qui a fait naître la filière de production dite "biologique" ;
- Réactions des consommateurs demandant des produits plus naturels et exempts de résidus de pesticides ;
- - Réactions, tardives il faut bien l’avouer, des pouvoirs publics soumis aux pressions contradictoires des uns et des autres.
Comme en toutes choses, l’excessif rate son objectif et s’il faut dénoncer fermement les traitements systématiques, il faut se méfier également du retour à la nature et au mythe du bon sauvage. La vigne est une culture et le support d’une activité économique, ce qui n’a rien de naturel ni de "biologique" : il y a, forcément un effet sur le milieu, effet qu’il faut mesurer et essayer de réduire pour ne pas mettre en péril l’avenir de l’activité agricole. La mise en place, progressive, de bonnes pratiques agricoles et l’information sur l’évolution des maladies et des ravageurs, participent à cet effort de réduction des nuisances générées par la viticulture. Toutefois, il faut éviter les dérives administratives consistant à remplir fiches, formulaires et cahiers de charges qui viennent s’ajouter aux autres paperasses, rendant notre agriculture si peu agricole.
Les bonnes pratiques agricoles
En premier lieu, il convient de protéger les personnels, qu’ils soient applicateurs ou intervenants dans des parcelles venant d’être traitées. Ce deuxième point est souvent négligé et il n’est pas rare de voir des ouvriers effectuant des travaux en vert (ébourgeonnage, vendange en vert) dans des parcelles ayant reçu un traitement la veille. Si le soufre n’entraîne, en général, qu’une irritation passagère, on connaît moins bien les effets immédiats ou à plus long terme des autres pesticides.
Pour l’application, au cours de la manipulation des produits (opérations d’ouverture des emballages, remplissage des appareils, etc.) le port d’un masque, d’une combinaison et de gants ainsi que de lunette est obligatoire. Si le tracteur est équipé d’une cabine avec filtres (antiparticules + antigaz au charbon actif), l’équipement de protection individuelle n’est pas obligatoire pendant l’application. Il faut penser à changer les filtres régulièrement (en général après 20 heures d’utilisation). En ce qui concerne les pulvérisateurs (outils indispensables pour les cultures pérennes comme la vigne ou les arbres fruitiers) le parc français actuel (comme celui des voisins espagnols ou italiens) est vieillissant, souvent mal entretenu et très diversifié (canons, aéroconvecteurs, pneumatiques et appareils à jet projeté). Beaucoup d’appareils fuient, comme on peut le constater dans de nombreux villages viticoles dont les chaussées sont souillées régulièrement (y compris devant les écoles) par des traînées de bouillie bordelaise ou autres pesticides. La profession a, jusqu’ici, refusé le contrôle obligatoire et systématique (comme pour les voitures) des pulvérisateurs, sachant que cette mesure va entraîner une vague de refus d’agrément de nombreux appareils et la nécessité de renouveler le matériel : or la conjoncture économique n’est pas très bonne. Toutefois on peut espérer que l’utilisation de matériel plus moderne et mieux adapté, en plus de mieux respecter l’environnement, entraînera un meilleur état sanitaire général du vignoble. Le transport et le stockage des produits phytosanitaires posent également des problèmes, de même d’ailleurs que le stockage d’engrais azotés : l’explosion de Toulouse et les incendies de plusieurs dépôts ont poussé les pouvoirs publics à la révision de la réglementation. Toutefois le stockage à la propriété ne nécessite pas (pas encore dirons-nous) de déclaration en Préfecture, sous réserve de ne pas dépasser certains seuils : la quantité totale ne doit pas dépasser 15 tonnes. Pour les toxiques (T+), le stockage propriété est limité à 50 litres pour les liquides et 200 kg pour les solides. En principe, les produits phytosanitaires devraient être stockés dans des locaux particuliers, loin des habitations. Ces locaux bien ventilés doivent être fermés à clé et munis d’un système étanche de rétention des liquides pour éviter toute pollution par ruissellement.
À l’heure actuelle moins d’une exploitation sur 100 dispose d’un tel local réservé et conforme aux normes.
À noter que plusieurs sociétés commercialisent des locaux phytosanitaires tout prêts. La liste des pesticides autorisés sur vignes ou autres cultures varie d’un pays à l’autre ; y compris dans l’Union Européenne. On comprend mal, au niveau des utilisateurs et des consommateurs, cette situation, d’autant que les produits traités circulent librement à l’intérieur de la CEE Le problème s’aggrave avec le fait qu’un même pesticide n’a pas, le plus souvent, le même prix dans les différents pays de marché commun. Ainsi une pyrettrinoïde, insecticide assez banal, peut être vendu 2 fois plus cher en France qu’en Espagne, au grand dam des vignerons français qui, en théorie, ne peuvent pas aller l’acheter en Espagne. Cette distorsion de concurrence, qui vient s’additionner à beaucoup d’autres (fiscalité, coût de la main-d’oeuvre, du fuel, du matériel de culture, etc.) tend à l’élimination progressive, dans les pays de la CEE où les coûts de production sont les plus élevés, des vins de table et des vins à faible notoriété. Les mercuriales espagnoles ou italiennes, en bas de gamme, si elles font rêver le négoce et la grande distribution, désespèrent beaucoup de producteurs du midi de la France, du Val de Loire, et demain, d’autres régions.
Les crises successives de confiance des consommateurs envers les produits agricoles ont amené la profession à développer des services de conseils pour rationaliser la lutte contre les ennemis des cultures. Par ce biais, on peut espérer améliorer la qualité des produits tant sur le plan gustatif que vis-à-vis des qualités nutritionnelles : l’exemple des toxines fongiques est là pour nous rappeler que la nature peut être dangereuse. Par ailleurs le respect des doses et des délais d’emploi avant récolte doit permettre d’obtenir des raisins et des vins exempts de résidus de pesticides. Pour ce qui concerne l’environnement, la mise en place de pratiques simples comme les bandes enherbées autour des vignes, agissant comme des pièges à molécules chimiques ou la reconstitution d’un système bocager viticole, doivent contribuer à la limitation des pollutions. Tout cela a un coût et participe à l’agrément de l’espace, partagé avec des citadins qui ne sont pas forcément consommateurs de vin, ce qui pose le problème du financement de ces pratiques.
On le voit, la protection du vignoble est une affaire grave et complexe, qui implique beaucoup de monde et demande du sérieux et le sens des responsabilités. Le rejet, au siècle dernier, d’une viticulture basée sur les hybrides franco-américains résistants à la plupart des maladies mais donnant des vins de faible qualité a stoppé les recherches, tout au moins en France, pour réduire l’utilisation de pesticides au vignoble. D’autres pays de la CEE et non des moindres, n’ont pas suivi cette voie et ont développé des cépages résistants à l’oïdium et au mildiou grâce à des croisements, le plus souvent avec des obtentions françaises anciennes comme le chambourcin, le villard blanc ou le seyve-villard 5 276. Ces cépages sont encouragés, curieusement, par le mouvement écologiste (surtout en Allemagne et en Autriche) sous prétexte que leur culture est plus naturelle que les purs viniféra. Dans le même temps, l’utilisation de porte-greffes OGM résistants aux virus du courtnoué est rejetée par la profession unanime et les mêmes écologistes, alors que cela permettrait d’éviter des traitements de sols dangereux et polluants sans influer sur la qualité des raisins ou des vins : on ne doit pas toucher au mythe du vin, produit naturel, traditionnel... etc. Espérons que la réglementation sur l’étiquetage des produits alimentaires s’appliquera un jour au vin. Cela débloquera peut-être la situation en faisant voler en éclats le fameux mythe du produit naturel, tant la liste des additifs risque d’être longue (SO2, enzymes, tanins, gomme, acide tartrique, carbonates divers, bentonite, caséïne, sorbate, acide citrique, acide ascorbique, lysozyme, gélatines diverses...).
Ce tour d’horizon des problèmes posé par la protection phytosanitaire, nécessaire, du vignoble et le respect de l’environnement, montre que ce point reste délicat et très politique. Les arguments avancés par les professionnels pour refuser les contrôles ne tiennent pas devant un examen de la situation : dire, par exemple, que vérifier le bon état d’un pulvérisateur n’est pas une garantie que l’on sache l’utiliser est un aveu d’incompétence ! Il faudrait, aujourd’hui, et c’est un minimum, que l’appareil soit en bon état, le conducteur compétent, formé et informé. Par ailleurs, toutes les solutions "intelligentes" pour réduire les nuisances ne doivent pas être rejetées a priori pour sauvegarder des mythes auxquels plus personne ne croit.
SOMMAIRE
Préface
Table des matières
Introduction
1. Reconnaissance à partir des symptômes au vignoble
- 1.1. Observation après la chute des feuilles
- 1.1.1. Symptômes
- 1.1.2. Causes possibles
- 1.2. Observations au printemps et en été
- 1.2.1. Symptômes
- 1.2.2. Causes possibles
- 1.3. Carences en excès d’éléments minéraux
- 1.3.1. Circonstances favorables
- 1.3.2. Symptômes
- 1.3.3. Causes possibles
- 1.4. Accidents divers
- 1.4.1. Symptômes
- 1.4.2. Causes possibles
- 1.5. Toxicités de produits phytosanitaires
- 1.5.1. Symptômes
- 1.5.2 Causes possibles
- Index des illustrations
2. Éléments de biologie pour l’élaboration de modèles d’évaluation des risques pathologiques
- 2.1. Climat, vigne et pathologie
- 2.2. Élément de biologie appliqué et modèles d’évaluation des risques
- 2.2.1. Maladies
- 2.2.2. Ravageurs
- 2.2.3. Note sur les maladies et ravageurs difficiles à modéliser
3. Alimentation et santé de la vigne : éléments de réflexion
- 3.1. Alimentation et santé, c’est vrai aussi pour la vigne
- 3.2. Conséquences de cette mauvaise alimentation : une mauvaise santé et une grande vulnérabilité
- 3.2.1. Quelques pistes et travaux sur les rapports entre éléments minéraux et maladies
4. Culture raisonnable
- 4.1. Approche écologique du milieu cultural
- 4.1.1. Comment définir un vignoble ?
- 4.2. Gestion des risques au quotidien : connaissances et moyens
- 4.3. Données climatiques et écologie viticole
- 4.3.1. Élément du climat et leurs mesures - quelques effets
- 4.4. L’hygrométrie : une mesure fondamentale pour comprendre le fonctionnement des plantes et le développement des maladies
- 4.4.1. Hygrométrie et demande atmosphérique d’eau
- 4.4.2. Hygrométrie et maladies
- 4.4.3. Hygrométrie et ravageurs
- 4.4.4. Hygrométrie et baie de raisin
- 4.5. Élaboration des avertissements techniques
5. Diversification biologique au vignoble
- 5.1. Diversité des cépages
- 5.1.1. Un enjeu difficile et des obstacles réglementaires
- 5.2. Création d’un bocage viticole
- 5.2.1. Les haies et leurs effets sur le vignoble
- 5.2.2. Création de haies : une adaptation au climat local
6. Pathologies et vinifications
- 6.1. Mildiou
- 6.2. Oïdium
- 6.3. Black-rot
- 6.4. Brenner
- 6.5. Botrytis
- 6.6. Eutypiose
- 6.7. Esca (syndrome de l’)
- 6.8. Vers de la grappe
- 6.9. Acariens
- 6.10. Cicadelle des grillures
- 6.11. Viroses (court-noué, enroulement)
7. Carences et excès de minéraux, incidences sur les vinifications
- Introduction
- 7.1. Azote
- 7.2. Phosphore
- 7.3. Potassium
- 7.4. Magnésium
- Conclusion
8. Cycles et particularités de quelques maladies et ravageurs du vignoble - Taille et maladies du bois
- 8.1. Le phylloxéra
- 8.2. L’oïdium de la vigne
- Le climat a t-il changé ?
- La viticulture a t’elle changée ?
- L’oïdium a t- il changé ?
- Particularités biologiques de l’oïdium
- 8.3. Esca - eutypiose
- 8.4. La taille de la vigne : art ou nécessité ? Un peu de biologie - Pour comprendre ce que l’on fait en taillant
- 8.5. Pourriture acide
Illustrations complémentaires